Entre février et juin 2024, sur prescription de l’État, les archéologues de l’Inrap fouillent différents secteurs en centre-ville de Dijon. Les premiers secteurs fouillés, dont deux au pied de l’église Saint-Jean, révèlent les vestiges de son chevet et des sépultures de la nécropole du haut Moyen Âge de Dijon.
Ces opérations archéologiques interviennent en amont des travaux d’embellissement engagés par la Ville sur l’axe reliant la Cité de la gastronomie et du vin à la rue de la Liberté.
Évolution de l’église Saint-Jean
Mentionnée dès le VIe siècle comme basilique funéraire par l’auteur mérovingien Grégoire de Tours, Saint-Jean est rebâtie au XVe siècle dans le style gothique. Elle connaît différentes modifications jusqu’au XVIIIe siècle. À la révolution française, l’édifice est vendu comme bien national et se voit attribuer de multiples affectations jusqu’en 1974, date à laquelle il devient l’actuel théâtre du Parvis Saint-Jean. En 1809, l’église est amputée de sa partie orientale pour aménager l’actuelle place Bossuet. Dans les nombreuses strates de la fouille située à l’est de l’église, les archéologues ont mis au jour les imposantes maçonneries du chevet de l’édifice, révélant plusieurs états antérieurs au XVe siècle et jusque-là inconnus. Le premier état remonte au haut Moyen Âge, entre le VIe siècle et l’an Mil environ. Le second état devrait dater du XIIIe siècle, et s’illustre par un chevet rectangulaire doté de deux contreforts d’angle à 45 degrés. Enfin, le dernier état greffe deux absides au nord et au sud sur les contreforts de l’église précédente. Fonctionnant avec les élévations actuelles de l’église, il correspond à la reconstruction du XVe siècle. C’est ce dernier chevet qui a été arasé en 1809.
Une nécropole…
Dans le haut Moyen Âge, Dijon est encore constituée principalement du castrum, agglomération fortifiée qui s’étendait autour de l’Hôtel de ville et du Palais de justice. Dans la tradition romaine, les nécropoles étaient implantées à l’extérieur. Vers le VIe siècle, la principale nécropole s’étendait autour de l’église Saint-Jean. C’est sur une tombe de ce cimetière, qu’a été fondée à la fin du VIe siècle une nouvelle basilique vouée au martyr saint Bénigne, et à l’origine de l’abbaye du même nom et de l’actuelle cathédrale. Les fouilles de la place Bossuet et de la rue Danton ont permis de mettre au jour des sépultures de cette nécropole, dont on ne connaissait pas l’extension du côté. Parmi les centaines d’inhumations largement enchevêtrées de toutes époques, les archéologues ont fouillé une majorité de tombes faites de dalles de pierres posées à l’horizontale et à la verticale. En particulier, une grande quantité de tombes d’enfants entouraient l’abside du premier état de l’église Saint-Jean. Ces types de tombes sont caractéristiques d’une période située entre le XIe et le XIIIe siècle environ, soit pour les plus anciennes, avant le deuxième état du chevet de l’église Saint-Jean. Après le XVe siècle, la nécropole se réduit à la seule rue Danton, au sud de l’église, où les sépultures peuvent dater du XVIIIe siècle.
… et des sarcophages
Dans la zone de fouille à l’est de l’église Saint-Jean, plusieurs sarcophages en grès ont été mis au jour. De forme trapézoïdale caractéristique de la période mérovingienne (VIe–VIIIesiècles), ils sont souvent endommagés par le recoupement des sépultures. Dans la petite zone de fouille située au sud de l’église rue Danton, un sarcophage en calcaire se distingue par sa cuve rectangulaire et par son lourd couvercle de forme semi-circulaire. Celui-ci est d’un type plus ancien (IVe–Ve siècles). La fouille de ce sarcophage a permis de révéler trois squelettes témoignant probablement d’un phénomène de réutilisation postérieure. Des analyses complémentaires seront faites pour essayer de dater ces squelettes.