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Sommaire

Introduction

  • Une mer Morte pas si morte, par Estelle Villeneuve
  • Chronologie
  • Géographie et climat de la mer Morte, par Jean Sapin

Préhistoire et âge du Fer

  • La mer Morte, du Néolithique à l’époque perse (10000-332 av. J.-C.), par Oded Lipschits et Bruno Bioul
  • Une tombe d’époque perse près d’En Geddi, par Estelle Villeneuve

Périodes hellénistique et romaine

  • La découverte des manuscrits de la mer Morte, par Estelle Villeneuve
  • Les manuscrits de Qumrân: comment se sont-ils conservés ? par Mireille Bélis
  • Qumrân, pôle juif, par Jean-Baptiste Humbert
  • Juifs et Nabatéens, entre rives et rivalités, par Laurent Tholbecq
  • Masada et Machéronte, forteresses hérodiennes, par Bruno Bioul
  • La mer Morte aux périodes romaine et byzantine, par Joan E. Taylor
  • La navigation et le réseau routier autour de la mer Morte, par Joan E. Taylor
  • La mer Morte chez les auteurs anciens, par Bruno Bioul

Période byzantine

  • Le monachisme autour de la mer Morte, par Joseph Patrich

Découverte et actus, livres du mois.

6,00 

AT02 – La mer Morte, Du Néolithique à la période byzantine

La mer Morte est une des grandes curiosités de notre planète: elle occupe le point le plus bas du globe; son climat est d’une aridité extrême, ses eaux tellement salines qu’aucun organisme n’y survit… Paysage austère auquel on n’accède, depuis les collines voisines de Judée ou de Transjordanie, qu’au prix d’une interminable descente. Lorsque les explorateurs occidentaux l’ont découvert au milieu du XIXe siècle, elle avait hérité de l’Antiquité une solide réputation de désert sans vie. À tel point, pensait-on, que les oiseaux qui s’aventuraient sur ses eaux tombaient instantanément asphyxiés ! La route de Jéricho au nord du bassin restait le passage obligé pour qui voulait se rendre d’une rive à l’autre. Mais les rives elle-mêmes, délaissées par les autorités ottomanes, étaient la chasse-gardée des tribus bédouines, et l’on ne s’y aventurait pas sans escorte. Pas étonnant que nos voyageurs aient perçu la mer Morte comme un bout-du-monde, bien qu’y découvrant, non sans surprise, des sources généreuses et une végétation abondante.
Tel fut toujours, semble-t-il, le paradoxe de ce lieu étrange: lieu de frontières mais de passage, aride mais riche en ressources naturelles, peu peuplée mais souvent convoitée. Particulièrement active ces vingt dernières années, surtout sur la rive ouest, la recherche archéologique et historique n’a cessé de sortir la mer Morte de sa morne image d’Épinal. C’est bien le nouveau portrait qu’elle en dresse aujourd’hui que ce dossier d’Archéothéma veut présenter aujourd’hui, sous la plume de divers spécialistes.
Le géographe Jean Sapin plantera d’abord le décor, décodant grâce à la théorie de la tectonique des plaques les replis du terrain, l’origine de ses ressources naturelles et ses lieux les plus habitables. Nous remonterons ensuite le temps pour découvrir avec Bruno Bioul, rédacteur-en-chef d’Archéothéma, comment la mer Morte, avec l’oasis de Jéricho, a participé aux premières expériences néolithiques mondiales, avant que l’homme n’investisse plus ou moins durablement ses rives et leurs arrières montagneux, dans l’écho lointain des grands mutations du Proche-Orient. Mais une vie sédentaire durable motivée par l’exploitation des richesses naturelles (en particulier le bitume et le baumier) restait un défi humain que seule une administration centrale forte pouvait relever, comme le souligne l’archéologue Oded Lipschits, spécialiste de la Judée à l’âge du Fer. Cet investissement économique, doublé de la surveillance militaire du territoire face aux états d’outre-rive, semble débuter à Ein Gedi au temps des rois de Judée vers le milieu du VIIe s. et s’y maintenir sans discontinuer jusqu’à l’époque gréco-romaine. Autant que l’archéologie seule puisse en juger, car ce n’est vraiment qu’à partir du IVe siècle av. J.-C. que les auteurs antiques se penchent sur le cas de la mer Morte et son étrange écosystème. En confrontant leur témoignage – entre méfiance et fascination – avec les résultats de l’archéologie, l’historienne britannique Joan Taylor restaure le pseudo-désert dans sa vitalité d’alors. Mais on ne peut totalement comprendre le statut très particulier de ce microcosme sans le replacer au centre, et peut-être même comme objet, des rivalités qui opposèrent pendant plusieurs siècles les peuples des deux rives, juifs à l’ouest, arabes nabatéens à l’est, querelles dont Laurent Tholbecq de l’Université Libre de Bruxelles, décrypte magistralement les enjeux.
Un dossier sur la mer Morte serait incomplet s’il n’abordait les découvertes retentissantes faites à partir de 1947 dans les grottes de Qumrân, sur la rive nord-ouest. Là, juste avant que les Romains ne détruisent la Judée en 70, avaient été cachés des centaines de manuscrits juifs, près d’un petit établissement et d’un vaste cimetière. Les fouilleurs ont attribué l’ensemble des vestiges à la secte des esséniens dont les auteurs anciens vantaient la piété et la vie au désert: une interprétation que les progrès de l’archéologie ont sérieusement ébranlée et sur laquelle Jean-Baptise Humbert de l’École biblique et archéologique de Jérusalem fait ici le point. Mireille Bélis revient, quant à elle, sur la vaste opération de cache des manuscrits, telle que le restituent les indices archéologiques.
Enfin notre tour d’horizon s’achèvera à l’époque byzantine, avec cette nouvelle forme d’attraction régionale, évoquée par Josef Patrich de l’université hébraïque de Jérusalem, que sont les pèlerinages chrétiens sur les hauts lieux de la tradition biblique et la vie monastique aux confins du désert. À partir de 800, si Jéricho continue de présider aux allers-retours inter-régionaux, les rives de la mer Morte sombreront doucement dans cette léthargie où la trouvèrent les explorateurs contemporains